Tout savoir sur le SMIC

Temps de lecture : 1 min.
Publié le 11 déc. 2023
[Decryptage] Alors que le nombre de salarié·es payé·es au SMIC a progressé en 2023, certains remettent en cause l'indexation du SMIC sur l'inflation. Pour la CGT, il faut améliorer le fonctionnement du Smic et augmenter son montant ⤵️
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Qu’est-ce que le Smic ?

Le “salaire minimum interprofessionnel de croissance” (SMIC) correspond au salaire horaire minimum légal en dessous duquel les salarié·es ne peuvent pas être rémunéré·es.

Depuis le 1er janvier 2024, le SMIC est de 1 766,92€ bruts par mois, soit 1 398,69 euros nets pour 35 heures hebdomadaires. 

Le SMIC a été instauré au début des années 1950 en France. Il permet de maintenir le pouvoir d’achat quel que soit le niveau des prix mais aussi garantir un pouvoir d’achat qui progresse en même temps que le développement économique de la Nation (article L. 3231-2 du code du travail).

A la CGT nous pensons qu’il faut améliorer le fonctionnement du SMIC et augmenter son montant, afin qu’il remplisse réellement son objectif de garantie du pouvoir d’achat.

Que propose la CGT pour le SMIC ?

1 - Il faut augmenter le SMIC pour permettre aux salarié·es de vivre dignement.

Le SMIC a été automatiquement augmenté deux fois en 2023 en raison de la forte inflation :

  • Le 1er janvier 2023, de 1,81 % en application de la revalorisation légale annuelle
  • Le 1er mai 2023, de 2,22 % en raison de la forte inflation suite à la publication par l’Insee de l’indice des prix à la consommation

Au 1er janvier 2024, le SMIC a augmenté de 1,13%.

Ces deux mécanismes de hausse du SMIC sont strictement prévus par la loi (article L. 3231-5 du code du travail). Cette indexation sur l’inflation permet surtout d’éviter le moins pour les salarié·es, de maintenir, imparfaitement, leur niveau de vie. D’ailleurs une étude récente de la Dares (service statistique du ministère du travail) le confirme lorsqu’elle constate la baisse des salaires réels entre 2021 et 2022.

Il est donc indispensable de maintenir cette revalorisation automatique à laquelle doit s’ajouter le “coup de pouce”. Celui-ci est prévu à l’article L. 3231-10 du code du travail. Il signe un vrai geste politique en faveur d’une vie digne, ce que refuse de faire depuis très longtemps le gouvernement.

Le dernier “coup de pouce” date pourtant d’il y a plus de 10 ans. C’était en 2012 et il n’était que de 0,6 %. Le groupe d’expert·es du SMIC conclut, dans chacun de ses rapports depuis 15 ans qu’il existe, qu’il ne faut pas appliquer de “coup de pouce” au SMIC.

Pour la CGT, il faudrait un véritable “coup de pouce” sur le SMIC de 14 % pour que le SMIC atteigne un niveau décent, de 2000 € bruts pour un temps plein.

Cette revendication de la CGT converge avec les analyses de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES) qui indique qu’il faudrait un minimum de 1634 euros mensuels nets pour vivre décemment, soit 2092 euros bruts ( lire Fiche  "qu'est ce qu'un revenu décent) .

Elle se rapproche également de l’opinion recueillie par la DREES sur ce qui est considéré comme le minimum pour vivre par les personnes vivant en France. En Allemagne le gouvernement a décidé d’augmenter le salaire minimum de 22 % pour faire face à l’inflation en 2022.

Tous les syndicats représentatifs au niveau national interprofessionnel sont favorables à un “coup de pouce” pour le SMIC. Seules les organisations patronales s’opposent au “coup de pouce”.

2 - Il faut que les augmentations automatiques du SMIC, suivant l’inflation, servent de référence pour tous les niveaux de salaire, de points d’indice et minima de branches.

Le SMIC augmente automatiquement avec l’inflation, c’est une bonne chose. Selon l’Insee les revalorisations automatiques successives ont permis de limiter la baisse des salaires réels et donc du pouvoir d’achat des salarié·es qui ont les plus bas salaires en 2022, à la différence des salaires plus élevés qui n’ont pas cette évolution automatique.

Pourquoi ?

  • Parce que dans certains secteurs professionnels les employeurs refusent d’augmenter les minima conventionnels. Cela concerne 39 branches professionnelles au 24 novembre 2023 !
  • Parce que dans certains secteurs professionnels les employeurs refusent d’accorder des augmentations générales de salaire au moins égales au niveau de l’inflation. Entre 2022 et 2023 les salaires minima proches du Smic ont progressé de 6 %, alors que ceux qui sont plus au-dessus du Smic ont augmenté moins fortement (3,5 % pour les minima supérieurs à 1,6 Smic).
  • Parce que dans certaines entreprises les employeurs préfèrent renvoyer les salarié·es, et notamment les cadres les professions intermédiaires à des augmentations individuelles de salaire ou des primes. Pour une inflation à 6,2 % au 2e trimestre 2023, les salaires ont augmenté de 5,3 % pour les ouvrier·es, de 4,9 % pour les employé·es, de 4,6 % pour les professions intermédiaires et de 3,8 % pour les cadres. ( Annexe 6 du rapport 2023)

 

  🎙️Ecouter l'interview "négociation de branches" de Thomas Vacheron, secrétaire confédéral sur France Culture du 11/12/23 🎙️

 

 

Cela conduit à un inquiétant tassement des grilles salariales dans tous les secteurs.

Les niveaux de rémunération entre salarié·es sans diplôme nouvellement embauché·es et salarié·es qualifié·es avec ou sans ancienneté deviennent de plus en plus proches.

Le rapport du groupe d’expert·es du Smic (page 44-45) indique que l’éventail des salaires dans les conventions collectives, c’est-à-dire le rapport entre les salaires les plus hauts et les plus bas d’une même catégorie de salarié·es diminue. Cela signifie que l’écart de salaire se resserre, et ce depuis les années 2000.

Mais la dynamique s’accentue depuis 2022. Pour les ouvrier·es, l’écart est passé de 1,11 à 1,09 entre 2021 et 2022. Il était de 1,22 en 1996. Seuls les employeurs sortent gagnant de cette situation car ils tirent profit des qualifications sans les rémunérer.

A la CGT nous pensons que l’ensemble des salaires doit suivre l’augmentation du Smic et des prix.

Cette indexation doit être mise en place par la loi, dans le code du travail, comme c’est actuellement le cas en Belgique et au Luxembourg et comme c’était le cas en France jusque dans les années 1980. ( ▶️ Voir la vidéo : indexation des salaires sur les prix : l'exemple Belge)

Les salarié·es sont largement favorables à l’indexation des salaires sur les prix, y compris les salarié·es qualifié·es à responsabilité (ingénieur·es, cadres, professions techniciennes et intermédiaires). Ainsi 82 % des cadres et 89 % des professions techniciennes et intermédiaires y sont favorables.

Plusieurs syndicats se sont prononcés en faveur de l’indexation des salaires sur le SMIC et les prix.

3 - Il faut que le SMIC augmente plus souvent et plus rapidement.

Aujourd’hui le code du travail prévoit que le SMIC soit automatiquement augmenté dès que l’inflation atteint 2 %, et ce quelques semaines après la publication par l’Insee des chiffres de la hausse des prix.

La CGT propose que la hausse ait lieu dans les mêmes conditions à partir de 1 % d’inflation pour que les augmentations soient plus rapides, plus fréquentes et surtout qu’elles se rapprochent de nos réalités de vie.

Plusieurs organisations patronales s’y opposent et demandent au contraire que le seuil d’augmentation du SMIC soit réhaussé pour que le SMIC n’augmente automatiquement que si l’inflation dépasse 3 % par exemple.

4 - Il faut que le SMIC soit un salaire d’embauche minimum pour les personnes sans qualification.

A la CGT, nous pensons que le SMIC doit être un salaire de base minimum pour un·e salarié·e ne disposant d’aucun diplôme de formation initiale. Si on appliquait le montant du SMIC CGT, une personne sans diplôme serait payée, à l’embauche, au minimum 2000 € bruts par mois. Pour les personnes qui disposent d’un diplôme ou acquièrent des qualifications au fil de leurs années de travail, il faudrait que le salaire de base minimum soit supérieur au SMIC, en le multipliant.

Le salaire minimum garanti à l’embauche devrait correspondre à :

  • 1,2 fois le “SMIC CGT”, c’est-à-dire 2 400 € bruts par mois pour une personne qui dispose d’un niveau BEP / CAP
  • 1,4 fois le “SMIC CGT”, c’est-à-dire 2 800 € bruts par mois pour une personne qui dispose d’un niveau bac (général, professionnel ou technologique)
  • 1,6 fois le “SMIC CGT”, c’est-à-dire 3 200 € bruts par mois pour une personne qui dispose d’un niveau BTS / DUT (bac + 2)
  • 1,8 fois le “SMIC CGT”, c’est-à-dire 3 600 € bruts par mois pour une personne qui dispose d’un niveau licence (LMD) / licence professionnelle (bac + 3)
  • 2 fois le “SMIC CGT”, c’est-à-dire 4 000 € bruts par mois pour une personne qui dispose d’un niveau master (bac + 5)
  • 2,3 fois le “SMIC CGT”, c’est-à-dire 4 600 € bruts par mois pour une personne qui dispose d’un niveau doctorat (bac + 8).

Le salaire doit également doubler sur l’ensemble de la carrière pour prendre en compte l’acquisition de qualifications par les salarié·es.

Or aujourd’hui les qualifications des travailleurs·ses ne sont pas payées à leur juste prix. La non-reconnaissance des qualifications se joue dès l’embauche.

Ainsi, entre la génération diplômée en 1997 et celle diplômée en 2015 le salaire médian a baissé en euros constants de 40€ pour les diplômé·es de niveau licence et de 200€ pour les diplômé·es de master 2 ( Lire la note CEREQ : Que gagne-t-on à se former ? Zoom sur 20 ans d'évolution des salaires en début de vie active).

Ne pas payer les qualifications des salarié·es a permis aux entreprises d’accumuler des richesses dont elles se sont servies pour rémunérer les actionnaires plutôt que les salarié·es.

La part des richesses versés aux salaires a en effet baissé ces trente dernières années, au profit de celle versée capital (lire note des économistes atterrés : Partage de la valeur ajoutée, en 30 ans, la part revenant aux salaires s’est érodée) . Mieux rémunérer les qualifications permettrait d’augmenter la part des salaires dans les richesses produites.

5 - Il faut que le groupe d’expert·es du SMIC soit totalement remanié pour qu’il prenne en compte nos réalités de vie.

Le comité d’expert·es du SMIC a été mis en place en 2008. Il est chargé de préconiser les mesures à prendre sur le niveau du SMIC. Pour cela, il remet un rapport au gouvernement à chaque fin d’année.

Chaque année, depuis 15 ans, les rapports des expert·es du SMIC ont les mêmes conclusions. Ils disent qu’il ne faut pas augmenter le Smic car cela conduirait à réduire la compétitivité des entreprises et à détruire des emplois.

Or l’analyse de ce groupe d’expert·es n’est pas équilibrée et ne repose que sur une partie des études économiques actuelles.

Le pluralisme en économie est une condition de la démocratie car il permet au gouvernement et au parlement de prendre leurs décisions de façon éclairée à partir d’analyses diverses. Le rapport du groupe d’expert·es du Smic ne répond pas aux réalités de vie des salarié·es, qui sont les véritables expert·es du Smic, car ils et elles le vivent au quotidien !

Le Medef s’oppose à ce que la mission de rédaction du rapport sur le Smic soit retirée au groupe d’expert·es du Smic.

A la CGT, nous pensons qu’il faut faire évoluer le groupe d’expert·es.

Lors de la conférence sociale du 16 octobre 2023 le gouvernement a annoncé la création d’un “Haut conseil aux rémunérations”. Pour la CGT, cette nouvelle instance doit avoir une composition pluraliste, les organisations de travailleurs·ses doivent y participer et elles doivent pouvoir y désigner des expert·es qui portent une diversité de points de vue. Et ce sera à cette nouvelle instance de rendre un rapport annuel sur le SMIC.

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