Ni problème de financement, ni contrainte budgétaire (4/8)

Pour la CGT, les priorités restent claires :
- abrogation de la réforme des retraites imposant le report de l’âge légal à 64 ans, le rallongement de la durée de cotisation et la suppression des principaux régimes pionniers ;
- mise en œuvre d’une nouvelle réforme permettant un retour à la retraite à 60 ans.
Revenir à 62 ans pour atteindre le droit à la retraite à 60 ans
Pour de nombreuses raisons, le report de l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite est un problème majeur pour bon nombre de travailleur·ses.
Aujourd’hui les solutions existent pour financer à court terme et à long terme le système des retraites par répartition :
- 11 milliards d’euros par an : en 2010, à la demande de la CGT, la Cnav a présenté une simulation pour évaluer l’impact de l’égalité par le haut des salaires entre femmes et hommes sur les ressources du régime. Le gain par an (différence entre les ressources supplémentaires et les dépenses supplémentaires de la Cnav) serait de 11 milliards d’euros environ (projetée en 2023 dans cette simulation). À terme, avec l’augmentation des salaires, l’augmentation des pensions de retraite entraînerait une baisse de ces recettes – mais le solde reste positif ;
- 5 à 6 milliards d’euros par an : l’augmentation d’un point des cotisations vieillesse sur la part dite patronale pour financer la suppression immédiate de la réforme ;
- 2,2 milliards d’euros par an : la soumission à cotisations de l’ensemble des rémunérations versées sous forme d’intéressement, de participation ou d’actionnariat salarié ;
- 6 à 7,8 milliards d’euros par an : c’est le manque à gagner en fraudes aux cotisations sociales du fait du travail dissimulé (hors secteur agricole, DOM et économie souterraine). Cela entraîne une perte de ressources importante pour la Sécurité sociale qui pourrait permettre de compléter le financement.
- instaurer par ailleurs une contribution d’équilibre technique pour l’égalité entre les femmes et les hommes sur les entreprises de plus de 50 salarié·es ne respectant pas l’égalité (index inférieur à 100 %, en connaissant toutes les limites de cet indicateur imparfait) permettrait de rapporter 6 à 7 milliards d'euros.
Au moment où un record de 100 milliards d'euros de dividendes a été versé aux actionnaires des entreprises du CAC 40, mettre à contribution au même niveau que les salaires les revenus financiers pourrait apporter 14 milliards d'euros. De l’argent il y en a ! On sait où…
Le plafond imposé n’est qu’une manœuvre politique
Le gouvernement impose un cadre budgétaire très contraint à cette concertation afin de limiter les débats. Il souhaite ainsi plafonner les montants alloués aux retraites à 14 % du produit intérieur brut.
Si on fixe un montant maximum de dépenses de retraite alors que le nombre de retraité·es augmente, il faudra forcément baisser les pensions de retraite. Un même gâteau partagé à plus de monde ne peut aboutir qu’à des parts plus petites.
Cette menace de plafond, autrement appelée « règle d’or » par le patronat, vise à empêcher toute augmentation de cotisation notamment patronale : on glisse d’un système à prestation définie (garantissant un niveau de retraite suivant à peu près l’inflation) à un système à cotisation définie (les ressources n'augmentant pas, la variable devient le niveau des pensions). Le choix de ce seuil de 14 % est arbitraire sur le plan économique et relève avant tout d’une manœuvre politique pour justifier la réforme du système de retraite.
Au-delà du débat sur ce principe même de seuil à ne pas dépasser, il est nécessaire de rappeler qu’en l’état de toutes les prévisions actuelles, à aucun moment les dépenses de retraite ne vont dépasser ce seuil de 14 % dans les années à venir. Il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir ou à générer.
Ces prévisions reposent sur diverses hypothèses concernant l’évolution, dans les années à venir, de plusieurs facteurs tels que le nombre d’enfants par femme, le taux de chômage, la productivité du travail et le solde migratoire. Toutefois, même si ces hypothèses s’avéraient moins favorables pour le système de retraite, les dépenses de retraite ne dépasseront pas – ou à peine – ce seuil dans les années à venir.
Sur le plan politique, rappelons que ces chiffres représentent des vies humaines. Ils ne peuvent pas être considérés uniquement comme des outils pour équilibrer le système de retraite. Ainsi, ce seuil et son éventuel dépassement ne peuvent pas justifier une nouvelle réforme des retraites.
Pas de déficit des retraites des fonctionnaires de l’État
Le Premier ministre mélange les éléments pour créer le trouble : il existerait un déficit de 40 milliards d'euros dans le régime de retraite des fonctionnaires. Cette affirmation relève d’une posture politique, comme l'a récemment souligné le Conseil d’orientation des retraites (COR), pourtant dirigé par le très patronal Gilbert Cette.
Contrairement aux régimes de retraite par répartition, le régime des fonctionnaires repose sur une logique différente :
- les retraites des fonctionnaires sont financées directement par l’État, qui agit à la fois comme employeur et comme gestionnaire ;
- par conséquent, il est incorrect de parler de déficit : il s’agit d’une dépense budgétaire normale et prévisible, que l’État doit assumer au même titre que les salaires ou les autres frais de fonctionnement.
Le prétendu « déficit » mis en avant par le gouvernement est en réalité le résultat direct de ses différentes politiques, affaiblissant le ratio entre nombre de cotisant·es et pensionné·es :
- réduction drastique des effectifs de fonctionnaires : depuis des années, les politiques publiques favorisent une réduction des effectifs, augmentant ainsi mécaniquement le poids des retraité·es par rapport aux actif·ves,
- pression sur les salaires : le gel du point d’indice pendant plusieurs années a réduit les contributions salariales, aggravant les écarts entre recettes et dépenses,
- remplacement des fonctionnaires par des contractuel·les : le recours accru aux contractuel·les, qui cotisent dans d'autres régimes, diminue les recettes du régime des fonctionnaires sans réduire les obligations de l’État à l’égard des retraité·es.