Victoire pour les gréviste·es d’Onet Montpellier après soixante-dix-huit jours de lutte
Parmi les près de 400 salarié·es de l’agence Onet de Montpellier, 115 sont en charge de la propreté du CHU de la ville, centre gigantesque regroupant trois groupes hospitaliers. En effet, l’hygiène est un enjeu crucial dans le secteur de la santé, et les travailleur·ses d’Onet œuvrent chaque jour au maintien de bonnes conditions sanitaires dans le CHU. Les objectifs de la direction de l’entreprise de propreté montpelliéraine sont quant à eux loin d’être philanthropiques : du chiffre, du chiffre et encore du chiffre.
Dans cet objectif de rentabilité, la direction de l’agence a mis en place des dispositifs de traçabilité dans tous les sites sur lesquels Onet est prestataire – y compris au CHU. Dans ce dernier cas, les salarié·es devaient pointer à l’entrée et à la sortie de chaque pièce du centre, sous peine de sanction. Les instances représentatives du personnel n’ont été ni informées, ni consultées sur la mise en place du dispositif, qui a pourtant un impact très lourd sur les conditions de travail des salarié·es, devant parfois nettoyer plus de 90 bureaux en trois heures.
La direction campe sur ses positions, les salarié·es se mettent en grève
« J’ai échangé avec la directrice pour lui expliquer que ça ne se passe pas comme ça », indique Khadija Boulondn, délégué·e syndicale du syndicat CGT (majoritaire) de l’agence. « Elle a insisté en disant qu’il y a eu une note d’info sur le panneau du CHU et le règlement intérieur… Mais ça n’a rien à voir ! » Faute de réponse satisfaisante de la direction, le syndicat s’est rapproché des salarié·es. « Ils nous ont dit : “On nous impose ce dispositif, mais on ne prend pas en compte le temps consacré à son utilisation… Il faut qu’on s’arrête pour montrer qu’on a notre mot à dire“ » précise Khadija. Les salairié·es ont débrayé le 13 septembre (une heure le matin, une heure l’après-midi), puis le 14 septembre (deux heures le matin, deux heures l’après-midi), et le 15 septembre, le syndicat a lancé la grève totale, portant les revendications suivantes :
- refus de la mise en place du système de traçabilité, a fortiori sans consultation du CSE et des salarié·es ;
- annulation des sanctions abusives, sur des motifs liés à la dégradation des conditions de travail ;
- assurance que tou·tes les salarié·es disposent d’une fiche de poste définie ;
- une prime équivalente au 13e mois pour tou·tes les salarié·es de l’agence.
Dès le premier jour, 45 salaré·es ont rejoint la lutte. « Au cours du mouvement, certain·es salarié·es ont repris, d’autres se sont remis·es en grève – en moyenne, on avait 37 salarié·es en grève tout le long du conflit » précise Khadija. « Au tout début, on tenait le piquet à 5 heures du matin devant le CHU Lapeyronie, mais on s’est rendu compte qu’il faisait froid et qu’il y avait très peu de passage, donc on a décalé à 7 heures. Évidemment, tout changement était discuté en amont avec les salarié·es ! Tous les matins, on avait de quoi manger pour se réchauffer, on faisait un repas une fois par semaine, parce qu’on avait à disposition le local de la CGT du CHU… Il y a trois groupes au CHU, qui ne se connaissent pas forcément. Ces moments ont été l’occasion d’échanger les un·es avec les autres sur certains points… C’était très beau. »
Les soutiens affluent. Des salarié·es d’Onet Montpellier travaillant dans d’autres site (à la SNCF par exemple) se sont mis·es en grève également quelques jours au cours du mouvement. Le syndicat a bien sûr reçu le soutien de l’UL de Montpellier, de l’UD de l’Hérault et de la Fédération des Ports et Docks. La Confédération a également manifesté sa solidarité, via notamment un message de Sophie Binet. Des étudiant·es ont créé un comité de soutien pour aller sur les marchés, mettre en place des collectes, vendre des gâteaux et des T-shirt, organiser une projection de soutien… Soutien également au CHU : « le personnel du CHU a fait une affiche à l’Accueil d’Arnaud-de-Villeneuve “soutien aux salarié·es Onet grévistes”, on nous ramenait parfois un sac de viennoiseries le matin, en nous disant : “courage à vous“ – rien que ça, ça aide à poursuivre le mouvement. On a même eu des patient·es qui ont rejoint le mouvement ! Au début on avait de la musique, donc certains patient·es venaient danser… Plein de trucs comme ça qui nous ont touché·es » raconte Khadija. Des élu·es de gauche sont également venu·es soutenir le mouvement, y compris le maire de Montpellier.
Une négociation difficile
Face à la détermination des grévistes, la direction a bien été obligée de négocier. Dès fin septembre, elle a convoqué une réunion pour consulter le CSE sur la mise en place des dispositifs de traçabilité. Concernant les fiches de postes, la direction a reconnu qu’elles n’étaient pas mises en place sur tous les secteurs. En revanche, sur la prime équivalant au 13e mois, le même discours est ressorti à chaque négociation : « Le 13e mois ne se négocie pas en agence » – sous-entendu, c’est une négociation au niveau du groupe. Onet a fini par demander une médiation de l’Inspection du travail, qui n’a néanmoins pas porté ses fruits : « La DR du groupe est descendue sans mandat, donc elle ne pouvait rien proposer… ce qui fait que la médiation n’a servi à rien » déplore Khadija.
Plusieurs négociations s’ensuivront, dont une avec la participation d’un camarade de la fédération des ports et docs. À chaque fois, la direction n’a proposé qu’une prime exceptionnelle, et non une prime pérenne comme le demandaient les salarié·es. Finalement, un accord de fin de conflit a été signé le 1er décembre : « J’ai échangé avec les salarié·es, en leur disant qui allait bien falloir sortir du conflit, mais en continuant le combat en interne, avec une autre tactique. »
Une victoire qui en appelle d’autres
Ces soixante-dix-huit jours de grève s’achèvent finalement sur une victoire. Les salarié·es gréviste ont obtenu :
- une amélioration du dispositif de traçabilité, avec un seul passage du téléphone au lieu de plusieurs, et seulement un pointage à l’entrée du service et non dans chaque salle (sauf dans les secteurs sensibles (laboratoires, sanitaires, circulations de soins intensifs…) ;
- une prime de Noël de 650 euros.
Malgré tout, le combat continue. « Une négociation est lancée sur le 13e mois au niveau du central, on va voir ce qui va être fait, de toute façon c’est ensemble qu’on pourra avancer » précise Khadija. Mais pour l’instant, rien n’empêchera les salarié·es de célébrer leur victoire : « Le maire de Montpellier a mis une salle à disposition afin que les toutes personnes qui ont soutenu le mouvement puissent se réunir pour fêter ça .»
Félicitations à elles et eux, et nous leur souhaitons que cette victoire débouche sur d’autres futures avancées !
Les salarié·es d’Onet Montpellier ont toujours besoin de votre soutien ! Participer à la cagnotte