Halte aux violences sexistes et sexuelles, au travail aussi !
25 novembre, journée internationale de lutte pour l’élimination des violences contre les femmes
À l’occasion du 25 novembre, journée internationale de lutte pour l’élimination des violences contre les femmes, nous tirons à nouveau la sonnette d’alarme : il y a urgence à agir contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) partout – sans oublier les lieux de travail, où les VSS sont invisibilisées et pourtant massives.
#MeToo a 7 ans…l’âge de raison ? Quand les victimes seront-elles enfin entendues et prises en considération ?
Et dans l’univers professionnel, à quand des mesures fortes contre les VSS ? Aujourd’hui, l’écrasante majorité des employeurs, que ce soit dans le privé ou dans le public, ne font rien d’efficace pour prévenir les VSS, les détecter, protéger et accompagner les victimes, sanctionner les agresseurs puis reconstruire le collectif de travail.
La tolérance complice et coupable des pouvoirs publics et des employeurs est inadmissible, nous exigeons des actes forts et des mesures concrètes :
- Sanctionner les entreprises qui n’ont pas de plan de prévention des VSS et de dispositif de signalement/protection des victimes/sanction des auteurs ;
- Imposer la sensibilisation annuelle aux VSS de l’ensemble du personnel sur les lieux de travail et la formation des directions, des managers, des cadres avec responsabilités RH, des personnels de la médecine du travail et des élu·es au sein des Instances représentatives du personnel ;
- Octroyer aux référent·es violences et harcèlement les moyens de jouer leur rôle : bien définir leurs prérogatives, les associer systématiquement aux enquêtes quand des faits de VSS sont signalés, leur octroyer tout le temps de délégation nécessaire ;
- Permettre aux victimes de VSS qui n’ont pas de représentant·es du personnel sur leur lieu de travail d’être défendues et accompagnées par un syndicat face à l’employeur ;
- Faire prendre en charge par l’employeur l’ensemble des frais de justice, médicaux, sanitaires et psychologiques pour les faits de VSS subis en lien, à l’occasion ou du fait du travail (sur le lieu de travail, que l’auteur soit un collègue, un usager, un client, un intervenant extérieur ou un sous-traitant, ou lors des trajets) ;
- Garantir aux victimes de VSS, qu’elles aient eu lieu dans le cadre du travail ou dans un cadre conjugal ou intrafamilial, un certain nombre de droits permettant de protéger leur emploi et leur droit au travail : interdiction du licenciement et des autres sanctions quand les VSS impactent négativement le travail réalisé, possibilités de réaménager le temps, les horaires et l'espace de travail, mobilité géographique, jours de congés spécifiques sans avoir à fournir de justificatifs à l'employeur, etc.
La CGT appelle à participer massivement aux manifestations organisées partout en France par les collectifs féministes et invite les syndicats et les salarié·es à se mobiliser sur leur lieu de travail pour interpeller leur employeur et obtenir la mise en place immédiate de mesures efficaces contre les VSS.
➡️ Retrouver ici tous les outils pour agir
- La CGT agit pour une loi-cadre intégrale contre les violences sexuelles
La CGT est partie prenante de la Coalition pour une Loi Intégrale contre les Violences sexuelles, lancée mi-octobre par 45 organisations pour mettre fin à l’impunité et protéger les victimes.
Cette coalition, formée d'associations féministes, de défense des droits des enfants, de syndicats, d’expert·es, de juristes et de défenseur·es des droits humains, travaille à l'élaboration d’une loi-cadre intégrale couvrant l’ensemble des aspects de la lutte contre les violences sexuelles : viols, agressions sexuelles, harcèlement sexuel, système prostitutionnel, proxénétisme, traite des êtres humains, violences obstétricales et gynécologiques, mutilations sexuelles féminines, mariages forcés et violences sexuelles en ligne, que les auteurs et les victimes soient majeur·es ou mineur·es, que ces violences aient lieu au sein ou en dehors du couple – sans oublier les violences au travail.
Dix grandes ambitions structurent la loi-cadre que la Coalition appelle de ses vœux :
- Mettre en œuvre une véritable politique publique continue et coordonnée
- Investir à hauteur de 344 millions contre les violences sexuelles (et au total de de 2,6 milliards d’euros contre les VSS)
- Éduquer et prévenir
- Lutter contre l’industrie pornocriminelle et pédocriminelle et la culture du viol en ligne
- Développer une culture de la protection des enfants
- Responsabiliser les employeurs sur la prévention des violences et la protection des victimes
- Rendre les soins accessibles pour toutes les victimes
- Améliorer le dépôt de plainte
- Revoir la protection et le traitement des victimes pendant la procédure judiciaire
- Se donner les moyens d’une justice réellement spécialisée
Au sein de la Coalition, la CGT œuvre à éclairer l’angle mort que représentent les violences sexuelles dans l’univers professionnel. Elles sont encore largement invisibilisées alors que le travail, que ce soit dans la fonction publique, en entreprise ou chez des particuliers, est un lieu où s’exercent massivement des rapports de force et de domination – qui se trouvent exacerbés du fait que l’emploi conditionne l’accès à l’autonomie financière et à l’émancipation des femmes.
Les violences sexuelles en lien, à l’occasion ou du fait du travail sont massives, qu’il s’agisse de violences sexuelles avec contact (viol, agression sexuelle) ou sans contact (harcèlement sexuel et harcèlement sexuel dit environnemental, c’est-à-dire lié à l’ambiance de travail). Au cours de leur carrière, 30 % des salariées en France ont déjà subi du harcèlement ou des agressions sexuelles sur leur lieu de travail ; 9 % ont eu un rapport sexuel « forcé » ou « non désiré » avec une personne de leur milieu professionnel ; 10 viols ou tentatives de viol ont lieu chaque jour en France sur un lieu de travail. D’où les propositions que porte la Coalition.
Retrouvez l’intégralité des propositions de la Coalition sur www.loi-integrale.fr
- Les violences sexistes et sexuelles ne s’arrêtent pas avec l’âge...
Les violences sexistes et sexuelles, notamment conjugales, concernent aussi les femmes âgées, et de façon massive.
Un quart des femmes décédées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint ont plus de 70 ans…En ce moment, le procès dit des « viols de Mazan » défraye la chronique. Mais curieusement, personne ne relève l’âge de la victime : Gisèle Pélicot, 72 ans aujourd’hui, avait entre 59 et 68 ans quand elle a été violée par des dizaines d’hommes, dont certains ont l’âge d’être ses petits-enfants…
De fait, les femmes âgées sont exposées à des risques spécifiques de violences conjugales car elles cumulent des fragilités : dans le couple, elles sont souvent plus pauvres, avec des plus petites retraites, et plus isolées que pendant leur activité, quand elles ont travaillé.
Face à un mari violent, cet isolement et le manque de ressources suffisantes sont des freins importants. Mariées depuis longtemps dans une époque marquée par le patriarcat où la cellule familiale est « sacrée », avec l’homme en « chef de famille », il peut leur sembler alors insurmontable de se confier, y compris à leurs enfants...
Une prise en compte spécifique des violences faites aux femmes âgées est indispensable. Elle passe notamment par la formation des personnels soignants et des aides à domicile à la détection de situations préoccupantes et la création de structures spécifiques pour accueillir et accompagner les femmes âgées victimes de violence.
- L’EVARS : l’arme de prévention massive des VSS que les réactionnaires veulent détruire
L’EVARS, c’est l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, « une éducation à l’égalité qui déconstruit les stéréotypes et les normes sociales inégalitaires entre les individus » nous dit le Conseil économique, social et environnemental (CESE) qui préconise de rendre effectif le droit à cette éducation.
Des associations réactionnaires de parents y sont farouchement opposées et s’organisent en collectifs, prennent à parti les personnels de l’Éducation nationale et contreviennent ainsi à l’obligation de scolarité.
Or, la cible de leur courroux, l’EVARS donc, aide fondamentalement à déconstruire les schémas toxiques, à lutter contre les violences sexistes et sexuelles et à prendre conscience de son corps et de son intimité – ce dont on aurait pu imaginer que tous les parents se soucient, dans l’intérêt de leurs enfants…
La CGT exige que l’institution soutienne les personnels et applique réellement la loi, à savoir 3 séances par an pendant toute la scolarité, par des pédagogies adaptées à l’âge des élèves et enseignées aux personnels.
- Protégeons les enfants qui travaillent dans le spectacle !
Le spectacle, qu’il s’agisse d’arts de la scène, du cinéma ou de productions audiovisuelles, a toujours employé des mineur·es, à des fins d’interprétation d’œuvres artistiques.
Pour celles et ceux qui sont âgé·es de moins de 16 ans, des règles spécifiques existent. Tout employeur doit ainsi avoir une autorisation administrative, délivrée par la Préfecture une fois vérifié que le travail proposé ne compromet ni la santé ni le développement de l’enfant. Pour autant, cela ne suffit pas.
Ainsi Judith Godrèche ou Adèle Haenel, pour ne citer qu’elles, mineures quand elles ont démarré leur carrière, n’ont pu travailler dans le cinéma que parce que leur employeur a obtenu cette autorisation, bien insuffisante donc pour les protéger des violences sexuelles qu’elles ont subies.
Dans la production cinématographique, un grand pas en avant a été accompli en mai 2024, avec la signature d’un avenant à la convention collective qui prévoit qu'un.e responsable des enfants soit engagé.e par la production d'un film pour être la personne de référence sur le tournage, toujours présente, s’assurer de bonnes conditions de travail pour les enfants et, le cas échéant, recueillir leur parole et les accompagner. Un groupe de travail spécifique a été créé pour poursuivre la sécurisation de l’emploi des jeunes de moins de 16 ans dans le cinéma – la CGT y prendra toute sa part.
Dans le spectacle vivant, les choses avancent plus difficilement, malgré la révélation publique d’affaires de harcèlement et de violences...
Dans un secteur qui fonctionne beaucoup par cooptation et où le « blacklistage » est une menace forte pour beaucoup de salarié·es, dont un grand nombre sont précaires, dès lors qu’ils·elles osent dénoncer des faits et malgré des avancées notables, le combat doit se poursuivre pour que la parole des victimes soit entendue, et que les agresseurs soient mis hors d’état de nuire et de détruire des enfants dont beaucoup mettront une vie entière à se relever des violences subies. Le changement des mentalités et des pratiques passera notamment par une politique systématique et proportionnée de sanction à l’égard des agresseurs identifiés.