Le rachat des turbines « Arabelle » par EDF, une bonne nouvelle ?
L'encre était encore fraîche quand Emmanuel Macron est arrivé à Belfort dans le but d'annoncer son plan pour l'énergie basé sur la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires. Un protocole d'entente et de discussion exclusif avait été signé peu de temps auparavant entre General Electric et EDF en vue de l'acquisition par EDF d'une partie de l'activité nucléaire de General Electric Steam Power.
Le lieu choisi était particulièrement symbolique. Il s'agissait du site de production des turbines Arabelle, qui équipent les centrales nucléaires françaises. En 2014, alors ministre de l'Economie, Emmanuel Macron avait donné son aval à la vente de la branche énergie d'Alstom au groupe américain General Electric. Cette décision a eu pour première conséquence de nombreuses suppressions d’emplois. Elle avait conduit à un l'affaiblissement de toute une filière industrielle, abimant au passage la souveraineté nationale dans le domaine de l’énergie. En effet, malgré ses promesses initiales, General Electric a peu investi, aussi bien dans la recherche que dans les outils de production ou les compétences.
Le rachat par EDF porte sur une entité bien plus restreinte que l'ex-branche énergie d'Alstom. Il concerne la production et la maintenance des turbines à vapeur Arabelle, les plus puissantes du monde. Indispensables au parc nucléaire, elles sont présentes dans de nombreuses centrales.
Pour Virginie Neumayer, de la CGT EDF « ce projet de rachat n'a de sens qu'adossé à un projet industriel. Au regard des enjeux de la transition écologique, le nucléaire est devenu incontournable. On a besoin d'une énergie décarbonée, donc on a besoin de capacités industrielles pour pouvoir mener ces chantiers d'électrification à bien ».
Ce projet de rachat va maintenant faire l'objet d'un processus d'information consultation des instances représentatives du personnel, qui seront particulièrement vigilantes sur des sujets sensibles tels que la maîtrise des brevets et le détourage de l'entité. L'essentiel des activités et des salariés concernés par ce projet de rachat sont localisés en France, notamment à La Courneuve ou Belfort.
Pour les salariés, un certain nombre de questions restent en suspens. Ce projet de rachat aboutira-t-il ? Comment sera-t-il financé ? Quels seront les salariés concernés ? Les compétences clés seront-elles bien conservées par EDF ? Des inquiétudes légitimes au moment où le gouvernement impose à EDF de vendre à moindre coût une part importante de sa production alors même qu'elle produira moins, car plusieurs centrales sont à l'arrêt pour maintenance. L'entreprise chiffre la perte occasionnée à 8 milliards.
Pour Virginie Neumayer, il faut « revivifier tout le tissu industriel en décidant de grands projets reliés par une vision d'ensemble. Des plans filière par filière ne suffiront pas. » Les salariés se sont exprimés à de nombreuses reprises pour « remédier à la désindustrialisation, sans être pour l'instant entendus. » Il importe de leur « redonner leur droit d'expression sur leur travail ».